19 sept..2006
 


 

 

 


Un philosophe autrichien répond au Pape



Le discours du Pape Benedict XVI lors de sa conférence intitulée “Religion, raison et violence” donnée récemment à l'université de Ratisbonne en Allemagne a suscité des réactions de la part d’intellectuels et populations islamiques. Chose normale, dirait l’autre. Mais, il existe d’autres réactions faites par des non musulmans. Parmi eux, un philosophe en Autriche qui s’est élevé pour remettre les pendules à l’heure. Il s’agit du penseur Hans Köchler qui a estimé que le pape Benedict XVI a revivifié des préjudices anti-islamiques moyenâgeux, dans un contexte marqué par une tension croissante entre Occident et musulmans, causée par l’invasion de certaines puissances occidentales contre des pays islamiques. Pour ce professeur de l’Université d’Innsbruck, «la fausse perception unilatérale de l’Islam (qu’a montrée le Pape), ainsi que l’attitude hostile au Prophète Mohamed, qui remontent à des centaines d’années auparavant, ne peuvent qu’être brûlantes, et à même de miner l’effort de son prédécesseur en terme de dialogue entre les deux plus grandes religions monothéistes». L’intellectuel autrichien qui compte plusieurs ouvrages sur le dialogue entre civilisations et religions ne mâche pas ses mots. Selon lui, «le Pape a tort au sujet de l'Islam à plusieurs égards». Ce n’est point de simples allégations, puisqu’il n’y va pas les mains vides. Les preuves à l’appui. Par exemple, «dans la troisième partie de sa conférence, dit-il, le souverain pontife se réfère à la sourate 2:256 du Coran - "Il n'y a aucune contrainte dans la religion" - en tant que Sourate intervenue durant la première période de l’Islam. Selon le Pape, "(le Prophète) Mohamed était encore impuissant et sous la menace", alors qu'en réalité, ce verset remonte à la période moyenne (autour de 624/625) quand le Prophète était déjà en position de force, commandant un Etat à Médine». Si ce n’est pas mauvaise foi et préméditation, c’est quoi ? Ce n’est pas tout, selon l’auteur de «The Concept of Monotheism in Islam and Christianity», le pape est passé à côté de la plaque. Ainsi, l’idée que le souverain pontife se fait du «jihâd» semble, selon lui, «plutôt étriquée, ignorant jusqu’à la signification originale des «hududs» (lois pénales islamiques), et par là-même, Benedict XVI, en tant que numéro un de l'église catholique, a malheureusement rétabli l'esprit des croisades et aliéné la nation musulmane tout entière». Et le comble de la préméditation semble être ce 3ème paragraphe du discours du Pape, où il va jusqu’à emprunter une citation d’un chef de guerre. Un pape, prétendant défenseur du dialogue entre religion, s’allie ainsi à l'empereur byzantin Manuel Paléologue du 14ème siècle.
Voici en l’occurrence la citation qui a fait montre de tant de haine de la part du pontife, mais aussi de ceux qui l’adoptent : "Montrez-moi au juste ce que Mohamed a apporté de nouveau, et là vous trouverez seulement des choses mauvaises et inhumaines, telle sa volonté de diffuser sa foi et ses enseignements par l'épée." Ainsi, il est difficile de penser à Benedict XVI, comme un associé crédible dans le "dialogue des cultures", estime le Président de l’Organisation Internationale pour le Progrès (OIP), ONG consultative auprès de l’ONU! Et par conséquent, il sera mal placé pour pouvoir inviter d'autres religions à dialoguer, comme il l’a fait dans le dernier paragraphe de sa conférence. Et de préciser que le Pape n’est pas du tout sincère quand il fait sienne l’invitation à "écouter les grandes expériences et les perspicacités des traditions religieuses de l'humanité" et ses arguments contre la violence et en faveur du dialogue «ne convainquent pas aussi longtemps, surtout quand il ressasse les «sentiments anti-islamiques de la période des croisades». Benedict XVI veut dire que la compatibilité de la raison et de la foi, a été la résultante de l’alliance entre raison grecque et foi biblique, mais en intellectuel libre et d’une conscience professionnelle intacte, M. Köchler a apporté son rectificatif. L'Europe chrétienne médiévale n’a pu profiter de cette association entre raison et foi que grâce à «l'influence des philosophes musulmans - à un moment où les chrétiens européens étaient totalement ignorants du Grec classique».
Le philosophe autrichien est clair : Il y a une tendance dans tout le discours de Benedict XVI à impliquer l'Islam dans une attitude hostile à la raison. Volet violence, le penseur autrichien a été des plus clairs. Selon lui, «indépendamment des aspects savants problématiques et de certaines contradictions dans son argumentaire, le pape semble être plutôt hypocrite dans sa critique de violence effectuée au nom d'un Dieu». Ainsi, le souverain pont
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ife, et «tout en se rapportant à la condamnation, par un empereur byzantin, de violence au nom de l'Islam, a totalement omis d’aborder la question de violence employée par l'église catholique, des centaines d'années durant, contre des musulmans et d'autres peuples qu'elle a considérés comme non-croyants». Par ces attitudes, le Pape a mis l’église catholique en dehors de tout partenariat honnête et crédible en matière de dialogue interculturel, intercivilisationnel et interconfessionnel au 21ème siècle.


Repères

Prof. Dr. Hans Köchler, président de la faculté de philosophie à l’université d’Innsbruck en Autriche. Président de l’Organisation Internationale pour le Progrès (OIP), qui est une organisation non gouvernementale et organisation consultative de l’ONU. Prof. Köchler est philosophe spécialisé dans la philosophie du droit. Il est l’un des penseurs occidentaux les plus engagés pour le dialogue des civilisations. Il a à son actif une centaine de symposiums, de conférences, de congrès etc. dans ce domaine que ce soit en Europe ou dans d’autres continents. Parmi les philosophes les plus solidaires avec le tiers monde et des causes arabes justes comme la question palestinienne, la guerre contre l’Irak …
Critique par excellence de la nouvelle colonisation et du modèle américain : le libéralisme sauvage et inhumain. Critique du nouvel ordre mondial et de la globalisation américaine qui n’est autre chose pour lui qu’une attaque à la dignité humaine. Il a plusieurs publications, quelques-unes d’entre elles sont traduites en arabe.

Nouri zyad

 

 



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